SEXISME - Pour être "prise au sérieux" dans son travail, une PDG de la Silicon Valley a choisi de teindre ses cheveux blonds, porter des vêtements plus larges et changer ses lentilles pour des lunettes. Dans sa série "100 Femmes", lancée en 2013 consacrée aux problèmes et aux réussites des femmes dans le monde, la BBC News a recueilli le témoignage effarant d'Eileen Carey.
Dirigeante de l'entreprise Glassbreakers, qui conçoit des logiciels, elle témoignait, ce lundi 11 septembre: "La première fois que j'ai teint mes cheveux, c'était à cause d'un conseil, donné par une femme qui travaillait dans le secteur du capital-risque."
"On m'a dit que pour cette levée de fonds [qu'elle présentait à des investisseurs], il vallait mieux pour moi que je teigne mes cheveux en brun, parce qu'on accorde plus de crédit aux femmes PDG qui ont les cheveux bruns."
"Devenir brune m'a vieillie, et j'avais besoin de ça, j'ai l'impression, pour être prise au sérieux."
Alors que sur Twitter, beaucoup se sont indignés qu'une femme doivent changer son apparence pour un travail, d'autres femmes du secteur des hautes-technologies ont indiqué à nos confrères du HuffPost UK qu'Eileen Carey n'était "pas la seule" à ressentir ce genre de pression et que, malheureusement, il n'y avait là rien de neuf.
"Je pense qu'en général, les femmes se battent pour être prise au sérieux dans le secteur de l'internet, parce que ça a toujours été un secteur dominé par les hommes", déclare-t-elle au HuffPost UK.
"[La parité hommes-femmes] s'est vraiment améliorée ces dernières années, il y a beaucoup plus de femmes dans les positions de responsabilités dans le domaine des hautes technologies, chez les managers, les PDG, mais ça reste un problème qui doit être résolu."
Helen Wollaston, directrice générale de WISE, qui se bat pour une égalité hommes-femmes dans les sciences, la technologie et l'ingénierie, reconnaît qu'il est "triste" qu'une femme ressente des pressions pour changer d'apparence pour son travail, mais que cela ne la surprend pas.
"Je sais, à partir des témoignages qui nous sont rapportés chez WISE, qu'elle n'est pas la seule", a-t-elle expliqué au HuffPost UK.
"Il y a des femmes brillantes, des femmes aux cheveux châtains, bruns, blonds. Leur donner une meilleure représentation dans les médias, les entreprises, les écoles et les universités, aide à changer les perceptions, mais les vieux stéréotypes persistent."
Au-delà des stéréotypes, des problèmes de harcèlement au travail
Anne-Marie Imafidon, co-fondatrice de Stemettes, ajoute: "Malheureusement, l'apparence d'une personne influence encore la façon dont elle est traitée ; dans ce cas, la façon dont elle s'est sentie contrainte de teindre ses cheveux. Avant que les normes sociales ne changent, les groupes sous-représentés ressentiront cette pression à se 'changer' pour poursuivre leur carrière."
Therese Stowell, chef de produit dans l'entreprise de logiciels Pivotal, avait déjà écrit dans un billet de blog sur la nécessité d'encourager une diversité de genre dans les hautes technologies.
Elle aussi assure qu'elle n'est "pas du tout surprise" d'entendre parler d'une PDG qui ressente le besoin de changer son apparence.
"Alors que les entreprises de haute technologie ont travaillé sur la question de l'égalité hommes-femmes, les préjugés ancrés dans la société ne peuvent être combattus que difficilement. Les êtres humains sont programmés à faire des jugements rapides, c'est donc compliqué même pour les personnes qui prennent soin de se montrer inclusifs", explique-t-elle au HuffPost UK.
Ces remarques viennent après qu'un article du New York Times, publié plus tôt dans l'année, révèle à quel point les femmes dans le domaine des hautes technologies doivent faire face au harcèlement sexuel au travail.
Une vingtaine de femmes avaient témoigné de leurs expériences de harcèlement par leurs supérieurs, des investisseurs, ou par d'autres collègues masculins.